“J’ai su depuis ma plus tendre enfance que j’évoluerai un jour dans un milieu à faible représentation féminine, quel qu’il serait. Je me suis toujours mieux entendue avec les garçons et j’ai toujours partagé leurs intérêts. Quand on est enfant, ce n’est déjà pas facile. Les petites cases dans lesquelles on est incités à rentrer nous appellent déjà et il n’est plus accepté à cette période de la vie de faire des « trucs appartenant au genre opposé ».
D’un côté, je me disais que ça me rendrait super cool, que les garçons préféraient les garçons manqués [Spoiler Alert: c’est faux dans 90% des cas, mais tu bénéficies du statut de super pote quand même, ce qui n’est pas négligeable]. Étant petite, je n’ai eu que très peu de problèmes avec mon attitude non conventionnelle et, c’est bercée par cette illusion, que je n’ai pas eu honte de m’affirmer sur les plates-bandes masculines.
Au commencement de mes études supérieures, j’ai échappé à l’expérience de la non-parité scolaire. Et pourtant ! Première année de Licence en Animation Numérique: cinq filles, trente garçons. Ça s’est super bien passé. Nous avions tous des passions en commun, nous nous respections tous, chacun avait sa place, et ça a continué comme ça jusqu’à la fin de ces trois ans. Dans le monde du numérique en général, que ce soit du côté des rêveurs Game Designers, des passionnés 3D Artists ou des dilettantes, mais non moins doués, Web Developers (les trois filières de mon école de licence), je n’ai jamais ressenti de véritable malaise, de mise à l’écart ou de quelque manque de respect que ce soit.
En parallèle, mon arrivée dans le monde du travail a confirmé la tendance. J’ai toujours été entourée de gens charmants et respectueux dans toutes les équipes de techies que j’ai pu intégrer.
Bon, fini les petites fleurs et les papillons, rien ne peut être aussi parfait et aussi longtemps. Mes premières expériences de female-bashing ont pointé le bout de leur nez quand j’ai commencé à échanger avec des collègues et collaborateurs issus d’autres milieux.
Clients, commerciaux, marketeux, business holders, en fait tous les autres corps de métiers sans distinction, ont vite refoulé candeur.
Mon souvenir le plus “amusant” est celui d’un client qui appelle la R&D, entend ma voix, et demande immédiatement à parler à « quelqu’un de technique ». Apparemment, même si tu décroches à la ligne directe de la R&D, si tu as une voix trop aiguë, tu ne peux en aucun cas être quelqu’un de technique !
Les différences entre le milieu numérique et les autres milieux se sont confirmées durant mes années de master. Se déroulant dans une école très différente et plus orientée sur des profils commerciaux et marketeux, nous étions dans des classes où les élèves venaient principalement de l’un ou de l’autre de ces deux horizons professionnels, avec une ridicule pincée de profils techniques comme le mien. Les remarques, moqueries et blagues sexistes n’ont pas tardé à tomber, et comme d’habitude cela venait de toute part sauf de mes homologues nerds. Mieux que ça, leur présence représentait comme un refuge rassurant et respectueux.
Dans toutes mes expériences et aussi loin que je m’en souvienne, ce monde du numérique, si masculin en apparence, a toujours été ouvert. Je souhaite en témoigner pour que toutes les jeunes femmes qui choisissent de ne pas suivre une voie qui leur plaît par peur de ne pas être acceptées sachent que, si cela les passionne, elles seront reçues à bras ouverts et ne feront pas de différence genrée. Qui que l’on soit, il suffit de faire ses preuves.
Je tiens à remercier tous ceux que j’ai côtoyés d’avoir été aussi naturellement ouverts et de ne jamais avoir remis en question mes capacités à travailler avec eux.
Ça peut paraître naturel mais en fonction de l'environnement, c’est loin d’être un acquis.
Beaucoup de milieux professionnels devraient prendre exemple sur celui du numérique en termes d’acceptation et d’ouverture d’esprit.”
Astrid van Hal
Directrice Artistique chez Winzana